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Youpi !
Fini le temps où pour dénicher une aiguille dans une meule de foin il fallait y batifoler tant et plus à s’ébattre avec une gueuse, jusqu’à ce qu’elle pousse une gueulante plus forte que les autres, résultat probable, mais pas toujours, de la rencontre d’une de ses parties charnues avec la pointe acérée de l’aiguille coupable. C’est qu’il fallait donner de soi, nom de dieu, et s’attendre à recevoir une volée de coups par la mère, le père ou les deux, à cause que le foin était haché menu. Et puis quoi, qu’est-ce qu’elles foutaient à se trimballer avec leur ouvrage, les coquines, que les frusques qu’elles se cousaient se retrouvaient vite fait déchirées. C’est qu’on n’a pas toujours bien le temps, à la campagne.
Au jour d’aujourd’hui qui n’est pas plus celui d’hier qu’il n’est celui de demain, mais juste la veille du précédent, donc aujourd’hui, tu inocules une puce neuronale dans le chas de l’aiguille, une goutte de colle cyanoacrylate, et zou, vl’à ton aiguille qu’a enfin oublié d’être conne et qui se retrouve connectée à toi-même en personne, je veux dire à ton bigophone, un qu’est loin d’être con, ton ordi ou ce que tu veux qui a inventé la fil à couper le beurre en été, et  ton aiguille, crois-y qu’elle va se défiler, ben tiens !
Un objet intelligent connecté, c’est pas plus con, ni dépendant, voire moins, que celui qui l’utilise. Un clebs,même si on ne le perdait pas tout à fait par hasard, et vu qu’on avait du mal à le reconnaître à cause que faire 100 bornes à pattes c’est pas fait pour te donner bonne mine, c’était comme si on l’avait perdu une fois pour toutes. Puis les usurpateurs, faut se méfier, alors… Aujourd’hui, connexion oblige, c’est qu’il s’accroche, le bougre, et faut pas avoir peur de se faire suer le burnou pour s’en débarrasser. Comme quoi un objet connecté peut être intelligent et tout  la fois encombrant, comme l’intelligence elle-même. De ce côté, j’ai rien à craindre.
Et le collier, c’était pas fait pour les chiens ? je vous entends dire. Si fait, mais je n’ai encore jamais vu un clebs déchiffrer le nom et l’adresse de son propriétaire maître esclavagiste, alors que la puce électro-bio qu’on lui a carrée dans le trou du cul, une moderne comme tout et qui fait gépéhésse GPS, elle le ramène direct.
Pour le temps qu’on perd, donc celui qui passe, ni beau ni mauvais, c’est un peu plus compliqué, et pour le retrouver, en supposant qu’on se soit acheté une horloge normande équipée de sa puce, faut pas croire qu’il ne manquera pas quelques minutes aux heures qu’on aura perdues. On pourra toujours courir après les minutes, mais rien ne dit que des secondes ne nous échapperont pas. Alors autant dire qu’il y a peu de chance qu’on retrouve le temps perdu à la seconde près.
Je n’entrerai pas dans les détails en ce qui concerne la virginité perdue, je vous laisse imaginer en vous référant à l’aiguille de la montre perdue dans la meule de foin.
Les illusions. Rien n’est plus terrible que les perdre, surtout si on a perdu son sang froid lors de la grande migration aoûtienne et que, tout heureux de le retrouver, on  découvre sur le calendrier que le temps passé à le perdre nous a déjà amené en hiver. Autant dire que ça n’est pas demain la veille que je j’irai m’acheter des illusions connectées, eussent-elle un QI hors pair, ce qui m’étonnerait, les illusions étant d’une stupidité sans borne. Raison pour laquelle rien n’est plus terrible que de les perdre, attachés que nous sommes à nous attacher à ce qui ne présente aucun intérêt et nous pèse.
Quant aux routes, chemins, directions, orientations que sans cesse nous perdons, est-il vraiment sérieux d’envisager d’en faire des objets intelligents connectés ?
Oui ! Car où irions-nous, sinon ?